lundi 19 avril 2010

Panique sur le divan, suite.


Pour ceux que le débat Onfray/Roudinesco intéresse, on trouvera les mises au point de l'un et de l'autre sur le site mediapart: http://www.mediapart.fr/ .
Roudinesco, en gardienne du temple freudien, défend assez mal sa cause: au lieu de le porter sur les tenants et les aboutissants philosophiques de la méthode Onfray, elle en fait une affaire politique au risque de se ridiculiser elle-même en faisant passer Onfray pour un vilain fasciste (ce ne sont pas ses termes, mais on comprend très bien où elle veut en venir).
Onfray, lui, gonflé à bloc par la sortie de son bouquin, tombe dans la gueule du loup et lui répond en la faisant passer pour la petite soeur de Vichinsky, procureur stalinien des Grandes Purges.
On aimerait entendre un autre débat. Quelque chose qui recentre les choses sur la pensée de Freud, ce qu'elle a apporté à l'Occident et ce que l'on peut en retenir encore aujourd'hui pour avancer sur la connaissance de soi. Bien évidemment, Freud, comme tant d'autres penseurs, est critiquable: sa pensée est le fruit d'une époque, d'un contexte historique particulier, et lui-même ne maîtrisait pas tout de sa propre pensée.
En fait, on oublie trop souvent que la psychanalyse n'est pas seulement une "doxa" (un discours, une théorie), mais aussi une "praxis" (une pratique, une expérience). Or qui d'autres que les analystes et les analysés (dont je suis) pourraient le mieux rendre compte d'une telle chose? Et si les analysés prenaient la parole? S'ils écrivaient un livre à leur tour, non pour s'incliner devant la statue du Commandeur Freud, mais pour témoigner tout simplement de ce qu'ils ont rencontré lors de leur analyse?

1 commentaire:

  1. Exiger le débat par Roudinesco
    Après les propos de Michel Onfray dans Mediapart qui se définit comme «goy terroir du bocage de basse Normandie», victime des «beaux quartiers parisiens» et qui m’accuse d’être une «hystérique compulsive, stalinienne, éleveuse des vipères lubriques et des hyènes dactylographes, empochant les bénéfices de mon petit commerce» et «défendant les pédophiles et la pédophilie» et enfin de vouloir me mettre sur lui dans la «position du missionnaire». J’ai eu l’occasion de dire ce que j’en pense. Dans le contexte des polémiques qui entourent désormais les prises de position de Michel Onfray, je lui suggère d’accepter enfin le débat public, à armes égales, sur une chaine de radio ou de télévision, ce qu’il a refusé jusqu’à maintenant. Le public et les lecteurs jugeront.

    ARTICLE DE MAZEAU sur Médiapart d'hier soir

    Onfray, l’histoire et l’extrême droite

    Dans la polémique entre Elisabeth Roudinesco et Michel Onfray, Guillaume Mazeau, maître de conférences à l’Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne nous a fait parvenir ce texte.

    «Avant même sa parution, le dernier brûlot écrit par Michel Onfray contre Freud (Le crépuscule d'une idole, Grasset), fait déjà l'objet d'un violent débat. Beaucoup de bruit pour rien? L'historienne de la psychanalyse Elisabeth Roudinesco n'exagère-t-elle pas en décrivant Onfray comme un usurpateur qui réhabilite les thèses de l'extrême droite? Bien au contraire.
    Les dérives de l'intellectuel médiatique ne sont pas nouvelles et méritent d'être portées à la connaissance du public. En 2009, Michel Onfray a publié une apologie de Charlotte Corday (La religion du poignard. Eloge de Charlotte Corday, Galilée). Sortie dans une relative indifférence mais plutôt bien accueillie par les médias, cette histoire est pourtant historiquement médiocre et politiquement scandaleuse. Dans ce brûlot truffé d'erreurs énormes, Onfray veut montrer que Charlotte Corday peut aujourd'hui inspirer ceux qui lassés d'une gauche impuissante et rongée par les luttes fratricides, restent fidèles à l'action et à la vertu. Marat, censé personnifier cette gauche dévoyée, est stigmatisé comme un charlatan, un fou et un dictateur... clichés colportés par l'extrême droite depuis deux siècles. En les reprenant, Onfray ignore superbement les dizaines de travaux scientifiques publiés depuis une quarantaine d'années et qui ont contredit cette image. Presque à chaque page, le lecteur se voit infliger les citations les plus haineuses, inventées de toutes pièces. Ainsi, Marat n'a évidemment jamais dit «je voudrais que tout le genre humain fût dans une bombe à laquelle je mettrai le feu pour la faire sauter» (p. 27)... Non, les élites politiques de la Révolution n'étaient pas toutes corrompues. Non, les sans-culottes ne peuvent pas être décrits comme des cannibales ni comme des sauvages. Comment Onfray peut-il réduire la Terreur à une immense giclée de sang due à des meurtriers en série comme Marat ou Sade (chap. 9)? Surtout, jamais Charlotte Corday n'a été athée ni libertaire, mais une noble défendant une conception conservatrice des rapports sociaux et de la religion! Michel Onfray se rend-il compte que la quasi-totalité de ce qu'il dit provient de Mémoires ou d'écrits apocryphes pour la plupart publiés au 19e siècle par l'historiographie catholique et royaliste?
    Mais est-ce un hasard? La Charlotte Corday qu'Onfray cherche à ériger en modèle n'a jamais existé... sauf sous la plume des déclinistes proches de la droite fascisante qui comme Onfray aujourd'hui, suggéraient qu'il était possible de sortir de la crise des années 1930 à coups d'antiparlementarisme et d'appels à la violence. Lorsqu'elles sont commises par un des auteurs les plus médiatiques et les plus aimés du grand public, ces révisions de l'histoire et ces dérives idéologiques sont susceptibles d'être dangereuses. Elles doivent donc être dénoncées avec la plus grande fermeté.»

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